par René Audet (UL), Julien Lefort-Favreau (Queen’s), Corentin Lahouste (UL) et Mélodie Simard-Houde (UQTR)
Au terme de la deuxième édition du colloque Études du livre au XXIe siècle, il semble opportun de poser un regard transversal sur les propositions qui ont nourri cet événement et d’ainsi faire entendre les voix et avenues de recherche de jeunes chercheur·es issu·es du Québec, de France et de Belgique. Quelles tendances et pistes fécondes de réflexion traversent les interventions qui ont été diffusées dans le cadre de l’événement et de la plénière qui l’a conclu ? Quels rapports au livre et quelle conception des études du livre ces contributions mettent-elles en lumière ? Nous cherchons ici à en dégager les axes structurants et points de connexion, au croisement entre réinvestissements matériels, médiations éditoriales et modulations numériques, pour reprendre les titres qui étaient ceux des trois livraisons d’interventions. De la diversité des objets et des perspectives émerge une série de convergences révélatrices de la structuration progressive du champ des études contemporaines du livre.
Situer le livre dans un écosystème numérique et (trans)médiatique
D’entrée de jeu s’impose la prégnance incontestable du rapport de l’édition avec la sphère numérique. Le bilan du premier événement faisait déjà ressortir que « si le fétiche du livre est encore réel » aujourd’hui, on ne peut désormais faire l’économie d’une réflexion sur le numérique quand il s’agit d’appréhender le monde du livre imprimé. Les propositions données à entendre dans le cadre de cette deuxième édition souscrivent elles aussi largement à cette observation, faisant une place singulière aux développements technologiques liés à la filière du livre, notamment évoqués par Iñaki Ponce Nazabal, ou encore à l’importance d’internet et des réseaux sociaux pour l’enjeu de la découvrabilité, pointée par Victor Krywicki. On doit désormais compter avec le rôle clé joué par les communautés de recommandation littéraire en ligne, sujet qui compose un des axes centraux du propos de Lolita Duchatel. Trois interventions ont abordé de manière frontale le rapport avec le numérique : elles touchent à la reconfiguration, dans ce contexte particulier, des carnets de lecture (Lolita Duchatel), de la forme épistolaire (Ophélie Boucher) et de la pratique fanfictionnelle (Benjamin Arteau-Leclerc). En somme, on peut noter une véritable perméabilité des pratiques numériques au sein du champ éditorial contemporain, où le numérique apparaît comme une variable transversale prépondérante qui concerne à la fois la création, la production et la diffusion.
Néanmoins, la question s’est posée, lors de la séance finale, de la permanence de domaines et d’acteur·rices du monde du livre que l’on pourrait considérer comme coupé·es du monde numérique. Y a-t-il des maillons de la chaîne du livre qui échappent à cette perspective ? Persiste-t-il des îlots de résistance, que ce soit pour des raisons idéologiques ou par déficit de compétences ou de moyens ? Si cette question demeure ouverte, on a pu souligner la difficulté à faire exister les œuvres nativement numériques au sein du champ littéraire, de même que le défi persistant qui concerne leur enseignement, les élèves et étudiant·es ayant de la difficulté à les concevoir comme partie intégrante de ce qui peut être désigné sous le terme littérature. Le caractère atypique du format matériel et l’absence de discours critiques d’accompagnement contribuent assurément à ce que l’institution littéraire et la salle de classe demeurent des espaces encore étanches aux pratiques littéraires numériques et à leurs supports.
De même et au-delà du numérique au sens strict, se saisir du livre au XXIe siècle, alors qu’il a perdu « son statut de monopole sociétal et culturel », c’est indéniablement devoir prendre en compte son inscription dans un écosystème médiatique large, depuis les pratiques de création/production jusqu’aux modalités de réception et d’appropriation. Déjà, d’un point de vue symbolique (qui s’appuie sur une observation concrète des usages), le livre n’occupe pas forcément une place centrale et se trouve de plus en plus fréquemment pris dans des transactions avec différents architextes transmédiatiques, ainsi que Victor Krywicki a pu le mettre en avant dans sa contribution. Les pratiques fanfictionnelles évoquées par Benjamin Arteau-Leclerc soulignent une même dynamique, mise là en mouvement en total détachement de l’idée conventionnelle du cadre éditorial. Ainsi, eu égard à ce qui a été développé par plusieurs des participant·es, le livre s’appréhende, aujourd’hui peut-être plus que jamais, comme un support de publication parmi d’autres. Dès lors, se pencher plus en profondeur sur les enjeux de complémentarité médiologique est une perspective qui mérite qu’on s’y arrête, et à laquelle les présentations de Chiara Zampieri et Margaux Coquelle-Roëhm font justement écho. Une telle relativisation de la position du livre impose aussi de continuer d’interroger l’impact de cet écosystème médiatique sur les habitudes et les modalités de lecture des publics, en particulier des jeunes lecteur·rices qui situent différemment le rôle du livre dans leur consommation culturelle. En outre, de nouvelles formes de dialogue entre le monde éditorial et la sphère numérique dynamisent la circulation des livres : de nombreuses œuvres, notamment des fanfictions, repérées sur les plateformes web, sont imprimées par les maisons d’édition et deviennent des best-sellers. Si le livre imprimé conserve un statut symbolique fort dans le processus de consécration des œuvres, sa diffusion passe désormais par la découvrabilité sur les plateformes de vente numériques et sur les réseaux sociaux.
Appréhender un objet hyperdimensionnel
À une approche du livre comme support de discours et de représentations – perspective notamment investie par Ophélie Boucher et Natacha Pinsonneault – s’est adossée l’étude du livre comme objet commercial (Victor Krywicki) ou comme objet matériel. Le livre se révèle notamment comme un objet « hyperdimensionnel » – pour reprendre le terme d’Amy Catanzano –, témoignant de recherches graphiques, formelles, narratives et éditoriales (chez Margaux Coquelle-Roëhm et Iñaki Ponce Nazabal). Il est encore saisi en tant qu’outil de médiation culturelle et de rayonnement institutionnel (chez Chiara Zampieri), mais aussi comme agent identitaire vecteur de socialité ou, plus rudimentairement, comme faire-valoir symbolique (chez Lolita Duchatel), voire comme trace médiatique indirecte (chez Benjamin Arteau-Leclerc). On remarque donc la multiplicité des dimensions du livre qui ont été mises en avant. Cette multiplicité est tributaire du dialogue entre les études littéraires et d’autres disciplines qui nourrissent les études sur le livre aujourd’hui, telles la sociologie de la culture, les études culturelles et les sciences de l’information et de la communication. Le livre ne se restreint pas à une seule réalité, mais s’inscrit dans de multiples usages ; il est dès lors stimulant de le saisir suivant différents ancrages et points de vue. Dans cette lignée, une diversité de sources et de méthodologies ont été investies par les participant·es : prise en compte des environnements paratextuels et des discours des éditeur·rices, approche statistique, entretiens avec des créateurs·rices, expérimentation personnelle ou encore approche poéticienne, pour ne s’en tenir qu’aux plus saillantes. Les contributions ont ainsi pleinement tenu le pari de la perspective multifocale qui était visée dans le cadre de l’événement.
Arpenter les frontières du monde du livre
Il est intéressant de noter que plus de la moitié des interventions abordaient « différentes lisières, parfois extrêmes, du champ du livre », une belle formule que l’on emprunte à Sofiane Laghouati, que ce soit pour examiner diverses inventivités matérielles du codex et la constitution de propositions livresques dissonantes – qui transgressent les usages littéraires habituels, qui en rebattent les cartes –, pour évoquer des dynamiques de circulation de contenus en ligne, où les modes de réception se voient réaménagés et relativement désindividualisés, ou encore lorsque l’objet-livre à proprement parler n’existe plus que de manière spectrale comme dans le cas de jeux de rôle textuels fanfictionnels. De façon à la fois plus spécifique et oblique, la muséolittérature, mise en perspective par Chiara Zampieri, fait quant à elle bouger un des grands critères permettant de généralement délimiter l’objet-livre traditionnel : sa circonscriptibilité, c’est-à-dire le fait que tous les éléments du livre se trouvent rassemblés en un lieu et temps donné. En effet, ce type de corpus, en tant qu’« instrument muséographique », pour reprendre l’expression de Zampieri, est nécessairement rattaché à un contexte plus large, c’est-à-dire qu’il est appelé par le cadre muséal duquel il découle et dont il est plus ou moins fortement dépendant. Le livre forme dans pareil cas une entité à la fois synecdotique et intermédiale : une partie de son contenu, voire sa raison d’être, existe en dehors de lui, raison pour laquelle il se présente autant comme une porte d’entrée vers le musée que comme un prolongement de l’expérience muséale, et prend place aux côtés des gestes et us curatoriaux.
S’intéresser aux frontières, c’est aussi, comme l’ont fait plusieurs présentations, aborder une série de catégories éditoriales et génériques floues, non stabilisées dans les usages, dont les délimitations précises ne sont pas claires, et cela pour divers motifs : soit en raison de critères définitoires flottants (par exemple pour ce qui concerne le « young adult »), soit en raison d’une diversité de tendances observables dont plusieurs échappent à la classification et témoignent d’une hybridité générique (comme dans le cas du roman-photo, étudié par Iñaki Ponce Nazabal), soit parce qu’il s’agit de propositions critiques émergentes (comme pour la définition de la muséolittérature ou la représentation de la « diversité » dans les catalogues éditoriaux, abordée par Natacha Pinsonneault). La plupart de ces flottements délimitent en réalité des zones propices à un renouvellement des pratiques éditoriales – qu’il soit ténu ou radical – et de leur saisie critique, des zones qui constituent autant de brèches en regard des formes, usages et prises en considération hégémoniques ou coutumières. Plus difficile à saisir, l’enjeu du positionnement relatif de ces pratiques atypiques ou hétérodoxes reste entier : les livres inclassables persistent-ils dans leur position marginale parce qu’ils revendiquent leur singularité ou valorisent ce décalage ? Ou au contraire cherchent-ils à s’instituer dans le champ éditorial en redéfinissant à leur avantage les segmentations du marché du livre ? Il n’y a apparemment pas de réponse unique ni de tendance repérable – ces pratiques flottantes oscillant justement entre ces avenues, profitant des avantages de ces postures à défaut de bénéficier d’une visibilité ou d’une reconnaissance qui assurerait autrement leur viabilité.
En lien direct avec ces brèches, il est aussi marquant de voir que la question de pratiques amateurs ou artisanales, développées hors d’un cadre professionnel, a été diversement évoquée, autant du côté de la création (par exemple avec la micro ou l’auto-édition, marquées par une réappropriation du processus de production des ouvrages et par une remobilisation de l’épaisseur graphique qui y est fréquemment mise en œuvre) que du côté de la réception et de la médiation des livres (notamment au sujet de la critique amateur et de ses modalités interactionnelles spécifiques). Cela marque ainsi un intérêt probant pour les mutations et repositionnements de fonctions et statuts d’acteur·rices ou objets qui ont longtemps été écartés du champ attentionnel critique. Cet amateurisme fait aussi parfois office de positionnement dans le champ : résister à la professionnalisation, c’est aussi opposer un refus aux impératifs de « visibilité » et à la vitesse de production de la grande édition. Cette extension de la sphère de légitimité culturelle mais aussi d’agentivité, de même que ce rebrassage – voire l’abrogation – des hiérarchies positionnelles témoigne d’une volonté de reconnaissance de pratiques de multiples ordres qui ne se réduisent pas aux espaces d’autorité conventionnels ou institués. Ils permettent de dresser un portrait plus juste et étayé des dynamiques à l’œuvre autour de l’objet livresque et de l’écosystème diversifié où il s’inscrit en ce premier quart de XXIe siècle. On a pu en ce sens remarquer une attention nourrie pour des pratiques et objets éloignés des formes consacrées.
Saisir les interactions entre livre et société
Dans la droite ligne de ces reconfigurations positionnelles, on ne peut non plus ignorer des zones de porosité entre le livre et l’espace social, diversement évoquées par les interventions du colloque. On pense en premier lieu à la question du réaménagement des politiques éditoriales sur laquelle s’est penchée Natacha Pinsonneault, qui témoigne d’un souci grandissant de représentation de la diversité au sein du champ littéraire. Un exemple probant et inspirant est celui de l’initiative L’Espace de la diversité, OBNL dont la mission est de lutter contre le racisme par le livre, qui vise ainsi, avec sa nouvelle plateforme numérique lancée début mars, à mettre en valeur des auteur·ices autochtones et de la diversité culturelle, sexuelle et de genre au Québec et au Canada. Peut aussi être retenu un des enjeux politiques de l’édition, nommé par Victor Krywicki, attentif à saisir les effets du capitalisme contemporain sur le livre et la littérature – un aspect que l’on retrouve également de manière assez ostensible dans la présentation de Lolita Duchatel. Par ailleurs, l’association entre deux sphères socioculturelles distinctes que mettent en relief les présentations de Chiara Zampieri (les sphères muséale et littéraire) et de Benjamin Arteau-Leclerc (les sphères littéraire et interactive), constitue un autre type de croisement faisant du livre ou de sa matière un vecteur de désenclavement sectoriel. Il convient enfin d’évoquer le souci communautaire qui préside à la création d’entreprises éditoriales et de médiation de l’objet-livre.
On touche ici aux transformations des modes de circulation, de réception et de visibilité du livre qui ont attiré l’attention des participant·es. Les livres s’engagent avec l’écosystème médiatique évoqué précédemment et se dotent désormais de contenus augmentés, à l’instar des listes de musique placées au début de romans, une pratique récente mentionnée par Victor Krywicki. L’imprimé renvoie par là à d’autres formes de consommation culturelle de son lectorat. Que ce soit par la liste de contenus médiatiques ou l’insertion de codes QR, les maisons d’édition déploient des stratégies d’accroche en activant un imaginaire et des contenus qui débordent du livre et qui, en retour, inscrivent la lecture dans une dynamique culturelle plus large. L’importance acquise par les réseaux sociaux avec la pandémie de COVID-19 a elle aussi été soulignée. Des formes de critique et de réception amateurs, comme le Booktok, font désormais vivre le livre en marge des circuits traditionnels. Les auteur·rices cultivent de plus en plus leur présence sur les réseaux sociaux et se chargent d’une partie de la promotion de leurs œuvres, comme le signalait Lolita Duchatel.
L’imaginaire littéraire et éditorial a souvent construit, à tort bien sûr, une figure de créateur·trice qui déploie son œuvre en solitaire. S’il est connu de longue date que la production d’un livre relève d’un intense travail de collaboration (avec l’éditeur·ice, les réviseur·ses, l’équipe graphique, l’équipe commerciale, etc.), deux pistes actuelles, opposées, se jouent de cet imaginaire. D’une part, l’auteur·rice se trouve parfois à réellement œuvrer en solo – pensons à des pratiques d’auto-édition ou à la construction et la curation de son œuvre sur les réseaux sociaux, où le déploiement de plateformes numériques vient encadrer et accompagner ces gestes autrement trop spécialisés ou techniques pour des gens qui n’y sont pas formés. D’autre part, la mutation de la fonction auctoriale passe aussi par une actualisation de la polyauctorialité éditoriale et par l’implantation de nouvelles formes de travail en partenariat, sur lesquelles la séance synchrone a permis de s’arrêter. La question graphique, trop souvent reléguée aux praticien·nes ou aux spécialistes de design graphique, illustre avec force la collaboration inhérente à la création éditoriale : les œuvres marquées par une forte dimension visuelle profitent de cette polyauctorialité, mais elles participent d’une prise de conscience plus large d’une énonciation partagée – la négociation du rapport entre le blanc de la page et le texte, plus consciemment menée depuis la fin du XIXe siècle, ouvre sur des pratiques préfigurant notre façon de concevoir aujourd’hui l’espace de la « page » numérique. De façon immédiatement complémentaire, la dimension symbolique et politique de la signature est arrimée à ce questionnement, entre la défense du statut de l’auteur·ice (et la volonté d’en conserver les prérogatives) et le choix d’intégrer les partenaires de la chaîne du livre dans l’objet lui-même, ou à travers l’association à de petites maisons d’édition, un geste pouvant être perçu, et projeté, comme militant, dans un écosystème livresque perçu comme trop commercial.
Relever des impensés – ou penser une clôture programmatique du colloque
De tels événements scientifiques mettent en lumière des dimensions riches autant que variées sur un champ de recherche entier, mais dessinent en creux tout aussi bien des aspects négligés ou abordés de façon fugace.
La question prégnante de la matérialité est loin d’être épuisée, pour ce qu’elle est immédiatement mobilisée par son réinvestissement de la part des éditeur·trices souhaitant construire leur image de marque ou leur signature à travers un produit soigné ou marqué d’une forte originalité graphique. Ce rapport matériel se trouve parfois investi massivement par des impulsions typiques de la culture populaire, où l’objet lui-même est saisi comme icône : dans de nombreuses communautés, la récupération du phénomène littéraire opère selon un rapport fétichiste, les livres collector étant courus et mis en vitrine (numérique) sur les réseaux sociaux. Inversement, dans une vision plus critique, voire théorique, cette dynamique faisant dialoguer le lisible et le visible, que ce soit dans le livre lui-même ou ses alentours (par exemple le rapport musée/littérature), appelle le déploiement d’une véritable sémiologie à même de la décrire et de l’étudier. Et, en tant qu’industrie participant des enjeux sociétaux actuels, l’édition est invitée à mieux mesurer son impact environnemental : depuis la production et le recyclage du papier (et l’éternelle question du pilon) jusqu’à l’empreinte écologique des fermes de serveurs soutenant la diffusion du livre numérique.
Bien identifiée, examinée sous différents traits, la place de la technologie dans les études actuelles du livre reste toutefois peu cartographiée. Les discours sur la culture relaient des positions effrayées devant le rouleau compresseur de l’intelligence artificielle et de la puissance d’impact des recommandations algorithmiques ; plusieurs se laissent en revanche charmer par des possibilités d’accélération et d’automatisation offertes par les outils numériques. Un tel rapport conflictuel, entre technophilie et technophobie, structure les secteurs éditorial et culturel ; en raison du bouleversement rendu possible par ces avenues techniques, la polarisation paraît inévitable. La suite appartient aux personnes qui feront une réelle expérience de ces boîtes à outils – ce qui appelle pour sûr un accroissement de la littératie (en formation initiale et en formation continue), une ouverture à des configurations différentes (ici cocréation humain-machine, là optimisation des analyses de marché), ou encore des stratégies de détournement ou de renforcement (les outils algorithmiques de recommandation pouvant être contournés par des dynamiques transmédiatiques de mise en visibilité des œuvres jouant un rôle plus subjectif dans le travail de curation).
Dans une perspective méthodologique, il serait pertinent de favoriser une profondeur historique plus longue, permettant en quelque sorte de réconcilier l’histoire du livre et les études contemporaines du livre. Une telle vision conduirait à mieux identifier des mouvances plus lentes ou à repérer le caractère récursif de certains phénomènes (pensons à la modalité de la souscription, entre les XVIIIe et XXIe siècles, entre le livre papier et ses campagnes populaires, et le numérique et ses effets de communautés). La réinscription du caractère contemporain de certains usages, de certaines pratiques (sérialité, transmédialité) dans un temps long serait à même de mieux étoffer cette incidence capitale de la contrainte éditoriale, modulée par les contextes et les cultures, transposée entre papier et numérique. C’est à la lumière de ces pistes, et de celles, inédites, qui jailliront des esprits clairvoyants des prochain·es jeunes chercheur·ses, que se dessine l’horizon d’une troisième édition du colloque Études du livre au XXIe siècle. La traversée disciplinaire rendue possible par ce thème, la mise en commun de perspectives transculturelles, le renforcement d’un réseau de chercheur·ses spécialisé·es confortent l’idée d’une nouvelle itération de l’événement, que nous envisageons déjà avec enthousiasme.